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GŒTHE ET BEETHOVEN

(et le propre de la musique est justement quelle commence là où s’arrête la raison i.) En toute bonne foi et innocence ils ont cette opinion ; ils emploient, sans s’en douter, les formules magiques, tantôt à moitié, tantôt à rebours ; et maintenant, celles-ci qui avaient tant d’élan et d’éclat sont figées dans leur moisissure glacée et leur mortel ennui. Mais dans le cœur un secret mouvement se fait sentir, il paraît et disparaît, sans trahir son origine. Soudain, éclate en sa plénitude le génie, qui depuis longtemps, était déjà diffus dans le chaos désordonné, mais qui a grandi, degré par degré... (Beethoven). Tel est maintenant l’état de la musique. * 2 3 4à l’accouchement de la pensée fiévreuse dans la nuit. Même les historiens et philologues allemands, qui se sont appliqués à l’étude des textes de Bettine, avouent leurs doutes devant l’obscurité de certaines phrases. Heureusement, la paraphrase qu’en a faite Bettine, dans son édition du Gœthes Briefwechsel mit einem Kinde, en 1835, éclaire le sens de quelques passages. — Oserai-je prétendre que l’esprit général du morceau m’a paru clair : et l’intérêt que j’y ai pris m’a conduit à espérer que nombre de mes lecteurs Beethoveniens l’y trouveraient aussi. Sous la gaucherie de l’expression qui tâtonne, on reconnaît une vive et profonde intuition musicale ; et l’on en comprend mieux que Bettine ait lu au cœur de Beethoven.

J’ai mis entre crochets les passages empruntés à la paraphrase Bettinienne de 1835.

2. Dans le vocabulaire de Bettine, le « magique » e6t le « génial ». 3. [« Zelter, entre autres, ne laisse passer l’octroi à rien qu’il ne comprenne pas. »]

4. Cf. le mot de Goethe à Humboldt : « La musique est la pure irraison (« die reine Unvernunft ») et la parole a affaire seulement avec la raison. » (3 décembre 1808).