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GŒTHE ET BEETHOVEN

lettres la trahison du roi, et elle exalte le peuple. Mais les calomnies et les haines s’amassaient contre elle. Elle écrit, en avril 1848 à Pauline Steinhâuser :

— « Croyez que s’il avait été possible de me précipiter dans la fosse, on l’aurait fait1 / » Elle ne fléchit jamais. Et l’indomptable femme se retrouva, le front haut, même après la ruine des espérances démocratiques. Elle reste « Freiheitsbegeisterte » (enivrée de liberté), jusqu’à la fin 1 2. Telle était la force de son prestige, telle l’auréole dont son maître Goethe l’entourait, qu’en dépit de leurs rancunes, après 1848, le roi de Prusse et les princes lui témoignent des égards, s’intéressent en 1851-1852 à la réalisation de son monument de Gœthe, à Weimar. Mais la fière Bettine éconduisit l’offre royale de faire exécuter l’œuvre, — disant que « Gœthe ne pouvait recevoir un monument que du peuple allemand » (« weil Gœthe nur vom deutschen Volk ein Denkmal erhalten kônne 3»).

Un désintéressement absolu. Malgré les invitations pressantes du roi, jamais Bettine n’alla à 1. Ibid., n° 119.

2. La collection do lettres vendues en contenait 42 échangées avec le poète hongrois Kertbeny. Ils se passionnent ensemble pour les luttes de l’indépendance hongroise. Kertbeny lui envoie, en 1849, une fleur cueillie par un condamné à mort, au moment de l’exécution.

3. Souvenirs de Mme Irène Forbes-Mosse.