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GŒTHE ET BEETHOVEN

coup plus qu’un écho V Elle s’y mêle. Elle agit. Un heureux concours de circonstances et son autorité acquise font qu’elle peut et qu’elle ose s’adresser directement au faîte — aux princes 1 2

— au roi de Prusse. Elle n’est point retenue par le respect des grandeurs et la peur de déplaire. Elle parle franc et haut. Elle s’était fait — et elle prétendait leur imposer — un idéal du Prince, serviteur de la communauté. « Tout appartient au peuple, écrivait-elle au Kronprinz de Wurtemberg. Que le prince se prive, mais que le peuple soit à Vabri du besoin ! Ils étaient à la fois flattés et intimidés par la grande attente que fondait sur eux cette Débora, ointe au front par Gœthe. Ils n’osaient pas trop protester, 1848 approchait, et ses effluves débilitaient la force souveraine. Elle devait se ressaisir durement, après.

Bettine avait, à Berlin, un grand partenaire : Alexandre von Humboldt. Dernier survivant, avec elle, de la glorieuse équipe des compagnons de Gœthe, il la soutenait énergiquement, il défen- 1. Je ne veux pas laisser croire que Bettine ait jamais adhéré au socialisme. Elle s’en défend, avec une hautaine ironie, dans un curieux entretien avec le jeune Wilhelm Buchner (30 nov. 1846. Cf. Aus Urgrosseltern Zeit, von Marie Buchner, 1928, Heilbronn). Elle fut toujours une fougueuse individualiste, qui refuse de se laisser agréger au troupeau. Mais c’est l’individualisme héroïque et révolutionnaire du bon chevalier à la « main de fer », défenseur des opprimés.

2. Le grand-duc de Saxe-Weimar, le prince de Wurtemberg.