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GŒTHE ET BEETHOVEN

sévèrement la stricte exactitude de ses tempi, de ses mouvements et de ses nuances : forte, piano, crescendo, diminuendo. En 1803, il écrivit, afin de fixer sa doctrine, ses Regeln für Schauspieler. Il y nomme la déclamation « un art de musique en prose 1 » (« eine prosaische Tonkunst »). Il note en marge de la Fiancée de Messine, comme d’une partition d’opéra, les nuances musicales de la déclamation :

— « Ici, bruire à mi-voix... » (« Muss halblaut rauschend. »)

— « Ici, plus clair, plus résonnant... » (« Muss heller, klingender. »)

— « Ici, sourdement. » (« Muss dumpf. ») — « Ici, profond et frissonnant. » (« Tief, schauerlich gesprochen werden. »)

— « Ici, un autre tempo beaucoup plus rapide. » (« Muss ein anderes, viel schnelleres Tempo gewâhlt werden. »)

et Gluck, qui lui semblaient (justement) les héritiers du grand art choral antique. Il en essaya les diverses possibilités dans ses poèmes musicaux et surtout dans son Second Faust. Le problème était surtout la réalisation pratique, au théâtre ; et la Fiancée de Messine lui offrit un champ d’expériences à tenter, sur sa scène de Weimar. Schiller se fût contenté bonnement de faire déclamer les chœurs à l’unisson. L’effet était pitoyable, froid et confus. Goethe organisa, au troisième acte, les deux chœurs antagonistes en soli, duos, trios, et chœurs alternés, crescendi et decrescendi, en tenant compte des registres de voix différents. (On trouvera notées, dans les Mémoires de Genast, quelques-unes de ces dispositions ingénieuses.) 1. « Musik war sie zu nennen », dit Genast de la déclamation qu’il imposait : « Elle était à nommer, une musique ».