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GŒTHE MUSICIEN

Beethoven ne semble pas avoir remarquée, dont je ne saisis point une seule trace dans son œuvre — (Faut-il qu’il l’ait ignorée, au point de caractériser les Français, encore en 1813, dans sa Bataille de Vittoria, par la marche grotesque de Malbrough 1 !...)

Gœthe l’avait entendue, lui, sur le champ de bataille, en Argonne, à Valmy, à Mayence ; et il en a conservé le frémissement, toute sa vie. Si bien que ce qu’il en a retenu — (quel phénomène saisissant !) — c’est le sombre et menaçant mineur — l’ombre, et non la lumière ! — Mais cette ombre n’a pour lui rien de commun avec la dépression de l’âme. Bien au contraire ! C’est une explosion de furie vengeresse...

— « Je ne connais rien de plus terrible qu’une marche militaire en mineur. Ici, les deux pôles s’entrechoquent et meurtrissent le cœur, au lieu de Vinsensibiliser. L’exemple le plus remarquable en est la Marseillaise ! a

1. Sur ce problème musical, j’ai eu recours à l’obligeante érudition des deux maîtres incontestés de l’histoire du chant populaire, en France et en Allemagne : M. Julien Tiersot, qui s’est fait l’historiographe de Rouget de Lisle, et le prof. Max Fricdlænder, b qui rien n’est inconnu du Volkslied allemand, aux xvme et y.ixe siècles. Les renseignements précis qu’ils m’ont donnés amicalement, ne font que rendre le silence de Beethoven encore plus surprenant.

On lira en appendice à ce volume un rapide historique de la Marseillaise, en Allemagne, où sa diffusion fut presque instantanée, mais sa signification étrangement altérée.