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LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

à plus tard l’examen de la question. Qu’il nous suffise ici de dire que ces années (1809-1813, qui dépassent le cadre de notre volume) seront pour tous les deux l’âge de la grande crise, d’épreuves, de déceptions, de bouleversement intérieur[1]. La vraie Thérèse naît. Le jeune Beethoven meurt.


    devait couver encore bien des années, — mais la ruine de sa sœur Joséphine, les catastrophes domestiques s’abattant sur les siens, précisément en ces mois qui exigeaient d’elle un dévouement entier, à eux, à leur salut — un sacrifice absolu. Tous ces événements, qui ne peuvent trouver place ici, je compte les raconter dans une étude spéciale, consacrée à Thérèse de Brunsvik.

  1. Leurs caractères sont, alors, singulièrement proches. On est surpris de trouver, sous la plume de Thérèse, des pensées qui sonnent comme des mots fameux de Beethoven :

    « Je ne veux plus confondre la bonté avec la faiblesse. Je n’étais jamais bonne, quoique je le crusse : la véritable bonté est alliée à la force… »

    Et plus loin :

    « La bonté stérile est une véritable faiblesse d’esprit et de caractère.,. Un homme qui s’en contente est une bonne bête ; mais s’il y joint des prétentions, il est le plus malheureux et le plus méprisable des êtres… » (Journal inédit, 1809).

    Ailleurs, Thérèse exprime dans les mêmes termes que Beethoven son aversion pour le « Kleinlichkeitsgeist » (l’esprit de petitesse) « Er ist mir verhasst. » (Journal, 1816, Cf. La Mara, p. 86).

    Et quel souffle héroïque !… Sont-ils de Thérèse ou de Beethoven, ces mots : « Ohne Gefahr und Kampf ist kein Sieg. » (« Sans combat et sans danger, il n’est point de victoire ! »).

    Ailleurs, elle souligne à plusieurs reprises des paroles qui étaient une pensée favorite de Beethoven et qu’il a mises en musique : « Edel sei der Mensch, hülfreich und gut ! »

    Mais comment s’étonner de ressemblances de pensée, quand on voit, par le Journal de 1811 (16 avril), la place que Beethoven tenait parmi les directeurs de sa pensée :

    « Welch himmlisches Vergnügen, in schönen Seelen und ihren Schrif-