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LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

Regardons-y de plus près ! Quand on a eu le bonheur d’assister, comme nous, aux représentations du Centenaire, à Vienne, on fait son mea culpa pour le malentendu d’un siècle, et l’on éprouve le besoin de partager avec d’autres la découverte — la splendeur révélée, dramatico-musicale, de l’acte II entier, cet unique chef-d’œuvre, sans précurseur, sans successeur, au théâtre musical.

Et sans doute, sa grandeur tient, toute, au génie du musicien. Mais le poème ne l’a point trahi. Le libretto est ici un robuste cheval qui ne bronche point sous le poids du cavalier. Beethoven lui rendait justice. Il a tenu mordicus, jusqu’au bout, pour l’excellence de son sujet. Plus tard, en 1823, causant avec Weber et goguenardant sur le compte des poèmes d’opéra de son jeune confrère, exécutant d’un mot sans indulgence l’incurable médiocrité des librettistes nierung des Fidelio (même publication). Il montre que tout, dans la mise en scène, doit être subordonné à l’expression de l’idée-maîtresse : contraste et progression entre ces deux pôles, ombre et lumière. Ses indications, pour faire moduler la lumière avec la musique, ne sont pas négligeables, à condition que de telles recherches ne dégénèrent pas en puérilité décadente. Nous avons vu, dans les représentations de Vienne, combien le ruissellement du jour, au lever de rideau de la scène finale, au sortir de la prison, s’accorde avec la blancheur éclatante de la symphonie orchestrale et chorale en ut majeur. — Mais l’essentiel est d’imprimer à l’ensemble un caractère d’unité monumentale.

(a) Berlioz dépeint un jeu de scène do la Schroeter-Devrient, au milieu du violent quatuor de la prison, quand le3 trompettes sonnent la délivrance :

— « Je la vois, avec le tremblement de son bras tendu vers Pizarre, et riant d’un rire convulsij. »