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AU-DESSUS DE LA MÊLÉE

à peu dans des consciences qui d’abord reposaient en la certitude de leur droit. La vérité lentement se fait jour. Qu’arrivera-t-il si sa lumière gagne et s’étend ? Portez-la dans vos mains ! Qu’elle soit notre meilleure arme ! Comme les soldats de la Révolution, dont l’âme revit dans nos troupes, combattons non pas contre, mais pour nos ennemis. Et, délivrant le monde, délivrons-les aussi. La France ne brise pas de chaînes pour en imposer d’autres.

Vous pensez à la victoire. Je pense à la paix qui suivra. Car les plus belliqueux d’entre vous ont beau dire et, comme dans tel article, nous offrir la régalante promesse d’une guerre perpétuelle, « d’une guerre qui dure après la guerre, indéfiniment[1] »… (elle finira pourtant, faute de combattants !)… il faudra bien un jour que vous vous donniez la main, vous et vos voisins d’outre-Rhin, ne fût-ce que pour toper dedans, pour vos affaires ; il faudra bien que vous repreniez ensemble des relations supportables et humaines : arrangez-vous donc de façon à ne pas les rendre impossibles ! Ne brisez pas tous les ponts, puisqu’il nous faudra toujours traverser la rivière. Ne détruisez pas l’avenir. Une belle blessure bien franche, bien propre, se guérit ; mais ne l’envenimez pas. Défendons-nous de la haine. S’il faut dans la paix préparer la guerre, comme dit la sagesse

  1. Paul Bourget.