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AU-DESSUS DE LA MÊLÉE


En parcourant ces écrits allemands inspirés par la guerre, où passe par moments un souffle puissant de révolte ou de douleur, je faisais une réflexion, que beaucoup de mes lecteurs français feront sans doute avec moi : je pensais que nos jeunes écrivains à nous n’écrivaient pas de « littérature ». Leurs œuvres, ce sont leurs actes ; et ce sont aussi leurs lettres. Et, je me disais, après avoir relu quelques-unes de ces lettres, que notre part était la meilleure. Ce n’est pas mon sujet de montrer en ce moment la place que prendra cette correspondance héroïque, non seulement dans notre histoire, mais même dans notre art. La fleur de notre jeunesse y a mis tout son être, sa foi et son génie. Pour telle de ces lettres, je donnerais les plus beaux vers du plus beau des poèmes. On le verra plus tard : quoi qu’on puisse penser de la valeur de cette guerre, quel qu’en soit le résultat, la France, — la France qui se bat — y aura écrit, sans y songer, sur le papier maculé de boue et, quelquefois, de sang, quelques-unes de ses pages les plus sublimes. Certes, cette guerre nous tient aux entrailles, plus que nos adversaires. Quel est celui de nous qui aurait le cœur d’écrire, lorsque sa patrie souffre et que ses frères meurent, un drame ou un roman ?…