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LETTRE À FRÉDÉRIC VAN EEDEN

droits des petites nationalités opprimées. Il en est dans les deux camps : Sleswig, Alsace-Lorraine, Pologne, nations baltiques, Arménie, peuple juif. Au début de la guerre, la Russie a fait de généreuses promesses. La conscience du monde les a enregistrées. Qu’elle ne les oublie point ! Nous sommes solidaires aussi bien de la Pologne écartelée entre les serres des trois aigles impériales que de la Belgique crucifiée. Tout se tient. C’est parce que nos pères ont laissé, par réalisme borné et par peureux égoïsme, violer les droits des peuples de l’Europe orientale, qu’aujourd’hui l’Occident est broyé et la menace suspendue sur tous les petits peuples, sur le vôtre, mes amis, comme sur celui dont je suis l’hôte, sur la Suisse. Qui fait tort à l’un d’eux fait tort à tous les autres. Unissons-nous ! Au-dessus de toutes les questions de races, qui ne sont le plus souvent qu’un mensonge sous lequel se dissimulent l’orgueil de la multitude et l’intérêt de castes financières ou féodales, il y a une loi humaine, éternelle, universelle, dont nous devons tous être les serviteurs et les défenseurs : c’est celle du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Et qui viole cette loi, qu’il soit l’ennemi de tous !

R. R.


De Amsterdammer, Weckblad voor Nederland 24 janvier 1915.)