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Je déclare maintenant que si mon respect pour le public qui m’a honoré de quelque confiance et ma déférence pour des amis que j’estime m’ont obligé à publier ces éclaircissements, je n’entends pas en cela descendre à une justification et avilir ainsi l’innocence.

On peut me reprocher la rigidité d’un caractère inflexible, qui se révolte de l’injustice, qui poursuit les abus sans égard aux passions des hommes, et qui va au bien sans ménagement, sans calcul d’aucun intérêt propre. J’ai haï toutes les sortes de despotisme, et j’ai réclamé contre, dans le temps même de leur faveur. Mais ceux qui me connaissent le plus n’ont eu à m’accuser que de la rudesse de la vertu, et je délie tous les autres de prouver que j’aie jamais fait quoi que ce puisse être qui ne fût pas dans l’équité la plus rigoureuse.

Je suis, etc.


Signé : Jean-Marie Roland,
Ci-devant Delaplatière.

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[À LANTHENAS ET BOSC, À PARIS[1].]
Le 28 juillet 1790, — de Villefranche.

Je suis arrivée d’hier au soir. Cette petite ville est tellement imbue des propos dont on nous accable, que j’ai voulu venir les entendre par le menu ; on y arrête notre domestique par les rues pour lui demander si nous n’avons pas peur d’être pris, et quelle figure font chez nous les fugitifs que nous y avons reçus ? Notez que je n’y ai pas vu un chat.

Il est impossible de se figurer toutes les absurdités qu’on débite ; il paraît qu’il y a une ligne dans la cabale aristocratique pour accuser les patriotes et, s’ils ne peuvent les traduire juridiquement, du moins leur nuire dans l’esprit du public, en les couvrant du plus odieux vernis. Dites à l’ami Bancal que cette femme dont il a vu les démarches durant cinq à six jours est accusée d’avoir, dans ces mêmes jours, visité tous les galetas de Lyon et répandu de l’argent chez tous les malheureux pour les engager à la révolte. On me lie, pour cette

  1. L’original de cette lettre a.s. 4 pages in-4o, vendu 131 francs, le 10 mars 1847, J. Charavay, expert [n° 420], a fait partie du fonds Coste de la Bibl. municipalle de Lyon, et se trouve aujourd’hui classé sous le n° 1758 des manuscrits, mais est en réalité relié (!) dans l’exemplaire du tome III, p. 485, de l’Histoire monumentale de Lyon, de Montfalcon.

    Le catalogue J. Charavay la croit adressée à Lanthenas ; disons plutôt à Lanthenas et à Bosc.