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vriers, à se prêter suivant leurs facultés à une taxe quelconque ou indemnité pour la ville des droits dont ils désirent et veulent la suppression.

Cependant Bosc nous mande qu’un nouveau décret[1] vient d’être rendu pour assurer ces droits et rechercher les auteurs de l’insurrection ; d’autre part, on dit que deux régiments sont appelés. Qu’est-ce que cela peut devenir ? je l’ignore.

On croit qu’un municipal[2], frère d’un député, a des intérêts communs avec le fermier des octrois[3], lequel, comme tous les gens de finance, est très protégé par le ministre. Il pourrait bien y avoir sous tout ceci des menées auxquelles on ne voit pas très clair. Le fait est que la conduite du peuple n’est point révoltante, comme on la dépeinte, et que celle de la municipalité est du moins très inconséquente.

Quant à la chose en elle-même, et quel que soit le système général, il est évident que les droits d’entrée à Lyon sont tels, par leur excès, que la fabrique qui en fait la splendeur, et même l’existence, ne saurait s’y soutenir s’ils subsistent.

Voilà ce qu’a prouvé notre ami dans un mémoire de son œuvre encyclopédique[4], publié avant la Révolution française ; voilà pourquoi, dans la municipalité, il propose une diminution de ces droits avec remplacement sur les loyers, c’est-à-dire sur les maisons.

Voilà tout ce qu’il a fait à ce sujet. Mais, comme l’aristocratie voudrait sa perte, elle travaille à le faire regarder comme l’auteur de l’insurrection ; le bruit en parait déjà porté dans la capitale, et dans trois ou quatre sections de Lyon, où domine l’aristocratie mercantile, on s’est répandu contre lui en propos les plus étranges. Ce qu’il y a de singulier, c’est que, dans la fureur de lui nuire, on a débité qu’il était probablement complice de Trouard, dernièrement arrêté à Bourgoing[5], fermé à Pierre-Seize, et trouvé avec des notes

  1. Décret du 17 juillet, confirmant le décret du 13 et y ajoutant des dispositions plus rigoureuses.
  2. Goudard, frère du député de ce nom.
  3. « Les fermiers Damoignac et consorts » (Wahl, p. 205 ; cf. p. 19).
  4. Voir note 4 de la lettre du 18 juillet 1790.
  5. Trouard de Riolles, maire royal de Pont-a-Mousson avant 1789, chevalier de l’ordre de Saint-Michel, avait été arrêté à Bourgoin le 8 juillet 1790. « C’était, dit M. Wahl (p. 175), un émissaire de cette sorte d’agence royaliste dont Mirabeau avait la direction. » Les papiers trouvés sur lui ne laissaient aucun doute sur sa mission contre-révolutionnaire. Il fut conduit à Lyon et enfermé au château de Pierre-Seize, puis