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quelque chose d’un autre plus communicatif, s’il est moins savant, et de Le Monnier même qui avait jeté quelque idée à ce sujet[1].


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[À BOSC, À PARIS[2].]
2 mai [1787, — de Villefranche].

Que devenez-vous donc, notre ancien et bon ami ? On n’entend plus parler de vous, on ne reçoit plus que quelques lignes bien courtes, pour envoi ou commission dont vous avez bien voulu vous charger, mais pas le plus petit mot d’amitié, pas une seule de ces causeries qui en sont la plus franche expression, parce qu’elles se font dans l’abandon du cœur et dans la confiance d’intéresser. Est-ce que vous ne nous aimez plus ? Est-ce que vous avez trouvé de meilleurs amis, des personnes qui vous apprécient mieux, qui vous chérissent davantage, qui désirent plus de cultiver avec vous une liaison douce et durable, fondée sur une estime réciproque et des goûts communs ?

Je ne vous envierai pas le bonheur d’avoir rencontré des êtres avec qui vous avez de l’analogie, et qui vous fassent goûter le charme de la communication de vos sentiments et de vos pensées ; mais je me plaindrai de ce que vous semblez oublier ceux avec qui vous partagiez autrefois cette satisfaction. Je vous ai moins écrit depuis quelque temps, je le sais, mais je vous ai dit pourquoi ; vous auriez dû nous plaindre de ce que l’enchaînement des affaires ou des sollicitudes diverses ne nous permettait pas de fournir autant que de coutume dans le commerce de l’amitié, et vous n’auriez pas dû nous écrire d’autant moins de votre côté, au contraire.

C’est en se suppléant réciproquement, suivant les circonstances, qu’on alimente toujours également la sainte amitié dont la bonne foi, la simplicité, le dévouement et l’indulgence sont les attributs nécessaires. Aussi, pour procéder suivant mes principes, je vous pardonne ce dont je pourrais me plaindre, et je vous donne les premiers instants non de loisir, mais de liberté que je

  1. Il y a, dans la collection Morrison, deux lettres de Roland à Bosc, des 18 avril et 8 mai 178, sur le même sujet. Il s’agit de certains renseignements sur les couleurs employées en peinture.
  2. Bosc, IV, 116 ; Dauban, II, 558.