moment pour la lui faire signer ; je vais vous la lire avant de l’expédier à M. de Vergennes. » — Cette lettre enveloppait, comme une chemise, tes deux mémoires ; elle exprime à M. de Verg[ennes] l’exposé de ta demande et le très court précis de tes raisons fondées sur trente années de travail, des voyages dans l’étranger, des connaissances dont tu as enrichi nos manufactures (pas un mot des ouvrages imprimés), et ta famille, l’une des plus anciennes du Beaujolais ; le ministre dit ensuite qu’il ne peut s’empêcher de témoigner que les services, la famille, les circonstances qui te sont particulières te méritent les bontés du Conseil[1].
Dans le vrai, on ne pouvait espérer rien de plus ni de mieux de M. de Calonne, la lettre eût-elle été rédigée dans ses bureaux. J’en suis fort contente. J’étais loin d’imaginer que cette lettre désirée serait l’ouvrage des Intendants du commerce et particulièrement de M. Bld. [Blondel] ; c’est assurément tout le succès que je pouvais me promettre, ou plutôt auquel je n’osais prétendre. Ce n’a pas été l’ouvrage d’aucune recommandation étrangère ; si ce n’est la personne employée très à propos par Mlle de la Bl. [Belouze], nulle autre n’avait encore parlé. Tu vois que, de cette manière, M. Bld. [Blondel] a tout le mérite de l’affaire ; je le lui pardonne, en vérité, car il y a réellement concouru et puissamment. En revenant chez moi, j’ai regretté de
- ↑ Voici cette lettre, qui se trouve deux fois en copie aux Papiers Roland, d’abord de la main de Lanthenas (ms. 6241, fol. 267-268), puis de la main de Madame Roland (ms. 6243, fol. 55). Elle est datée du 8 mai 1784 et adressée à M. de Vergennes par M. de Calonne :
« J’ai l’honneur de vous faire passer, Monsieur, un mémoire présenté par le sieur Roland de la Platière, inspecteur des manufactures de Picardie. Ce particulier demande des lettres de noblesse. Il expose qu’il est employé par l’administration depuis plus de trente ans ; qu’après avoir voyagé en Allemagne, en Italie, en Portugal, par les ordres de M. de Trudaine, il a enrichi l’indutrie nationale de toutes ces connaissances qu’il a recueillies chez l’étranger. Le sieur Roland a joint à son mémoire des détails qui prouvent que sa famille est une des plus anciennes du Beaujolais et a toujours tenu un rang distingué dans cette province. Je ne puis, Monsieur, que m’en rapporter à votre prudence sur ce que vous jugerez convenable de proposer au Roi relativement à la demande du sieur Roland de la Platière ; mais je ne puis lui refuser de vous témoigner, Monsieur, qu’il a été véritablement utile aux manufactures et que, par sa nature et l’ancienneté des ses services, il parait mériter la bienveillance et la protection du Conseil.
J’ai l’honneur, etc… »