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nière affaire proposée est une vision qui n’aurait pas le sens commun ; mais elle est pour les bonnes, qui sont en l’air, d’une incertitude qui m’impatiente et [que] je qualifie comme elle le mérite. C’est peine perdue ; elle sera toute sa vie victime d’une mauvaise tête associée à un cœur délicat, à un tempérament de feu. La mère se conduit bien et très bien ; on voit qu’il ne lui coûte pas autant de perdre celle-ci que l’autre. Les jeunes gens[1] vont revenir ce carnaval ; ce spectacle ne rétablira pas l’équilibre chez la sœur.

L’anglais de Dom. Bld. [Blondin] me fait perdre tout mon temps ; je suis des heures à chercher des mots. J’ai trouvé et traduit une petite note sur le sparte, dont tu pourras peut-être faire usage. Si j’en jugeais par ce que j’éprouve à ce moment, je croirais n’être plus aussi propre que par le passé à l’étude des langues, je m’impatiente grandement de feuilleter un dictionnaire. Oh ! mon pauvre latin ! Heureusement Eudora pourrait s’en passer. Bisognorebbe purgarmi ancora, ma s’aspetta nuove di cardinale e si deve star quieta. Adieu, cher ami, ne te presse pas ; aime-moi bien, embrasse ton frère : sono di te la tortorella.

P.-S. — j’ai reçu réponse de Vincennes ; nous déciderons à ton retour d’après les moyens de faire passer, etc…


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[À BOSC, À PARIS[2]]
9 février 1783, — [d’Amiens].

Je ne vous dirai pas comme la femme du vieux conte : « Eh ! je veux être battue, moi ! » Je ne serais pas de ce goût-là. Mais je vous apprendrai que ce mot loup qui vous paraît si terrible, est une gentillesse, une douceur, un charmant nom qui m’est acquis, non de temps immémorial, car c’est du len-

  1. Sophie Cannet et son vieux mari, M. de Gomiecourt.
  2. Bosc, IV, 50 ; Dauban, II, 488.