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tu puisses au moins lui dire toi-même ce que tu penserais de sa besogne. Ce seigneur paraissait peu satisfait du billet pressant que je lui avais envoyé, en conséquence duquel, cependant, il rapportait l’ouvrage. Ceci s’est passé vers les Rois ; depuis ce temps, j’ai rangé, serré les livres dans une petite armoire du cabinet ; ils y dorment en attendant que tu les appelles à la lumière.

Je vois avec chagrin, mais sans étonnement, les désagréments que jetteront dans ton travail l’insolence et la friponnerie des libraires ; en les traitant comme tu fais, on les met bien à leur taux, main il est fort maussade d’être en correspondance avec ces gens-la. Je vois que, dans cette capitale, où l’on est toujours attiré par la variété, la singularité des scènes, on prend toujours aussi de nouvelles raisons de s’en éloigner par les vices de ceux qui l’habitent.

Je ne puis dire combien, pour la santé, pour la paix et tout te reste, j’envisage le Clos avec complaisance et voudrais sauter à pieds joints les quatre ans à passer[1] pour atteindre ce but.

Je vois que tout ce qui tient aux imprimeurs, etc., en partage l’esprit tracassier ; les histoires de Dieppe[2] ne prennent pas une tournure heureuse, et cet aperçu me peine ; j’aime à croire qu’il y a plus de maladresse que de toute autre chose ; mais toujours, les résultats sont-ils plus que désagréables.


Après-dîner.

M. d’Hervillez est venu ; je lui ai exposé l’état des choses et tout ce que j’avais observé ; il a prévenu mes idées et m’a assuré que l’enfant avait des vers ; je lui ai dit que je l’avais soupçonné et que c’était en conséquence de ce soupçon que je l’avais fait prier de passer. Il parait

  1. C’est au commencement de 1755 que Roland avait eu une « Commission d’élève-inspecteur avec de appointements » (mx. 6243, Mémoires des services, fol. 31-43). C’est donc 1785 qu’il devait avoir les trente années réglementaires pour obtenir une pension de retraite.
  2. Roland, dans sa lettre du 27 janvier, se plaignait amèrement des frères Cousin, qu’il accusait du peu de succès des Lettres d’Italie : « … Je suis las d’avoir fait des ingrats. J’ai travaillé pour lui [Despréaux], tu ne te persuaderas jamais avec quelle ardeur. Il m’ont tout fait payer le double… »