Champagneux, dans son édition de 1800, donna un portrait (B. A. — Nicollet del., — S. C. Gaucher inc., — an viii), en rappelant que la mobilité du visage de Madame Roland avait toujours rendu difficile la tâche des peintres : « quatre artistes habiles ont échoué[1]. La gravure qui accompagne cette édition est un cinquième effort, et qui a été le plus heureux. La ressemblance y est, mais une infinité de choses de détail ont échappé au pinceau. On y trouve sa physionomie, lorsqu’elle était dans une situation tranquille ; mais comme cette physionomie se modifiait en autant de manières que son âme éprouvait d’affections différentes, toutes ces physionomies nous manquent… *.
Le témoignage est important, Champagneux avait vécu dans l’intimité des Roland : il est donc bon juge, et le portrait qui accompagne son édition doit être tenu pur un des plus ressemblants.
Plus tard, en 1827[2], un autre éditeur, Barrière, annonçait en ces termes un autre portrait : « Nous devons au crayon de Mademoiselle Godefroid quelques-uns des traits qui ont aidé la gravure à tracer l’image de Madame Roland. Ce portrait, exécuté d’après un dessin original de la plus parfaite ressemblance, sera publié avec un fac-similé de la tête de vierge que Madame Roland avait dessinée dans sa prison… » (t. II, p. 311).
Mademoiselle Godefroid, fille de la maîtresse de pension qui avait recueilli Eudora Roland à la fin d’octobre 1793, était une artiste distinguée[3]. Mais elle n’avait jamais vu la mère de sa compagne de jeunesse. Aussi ne put-elle travailler, Barrière le dit lui-même, que d’après « un dessin original de la plus parfaite ressemblance ». Quel dessin ? Si on considère que Barrière tenait de Bosc les renseignements divers dont il a enrichi son édition, on sera amené à présumer que c’est Bosc qui lui aura fourni ou promis ce « dessin original ». Nous allons voir, un peu plus loin, ce que ce pouvait être.
Nous croyons d’ailleurs que ce portrait promis par l’éditeur n’a pas été publié. Nous ne l’avons trouvé ni dans l’édition de 1827, ni ailleurs.
Il existe, au château de Rosière, chez Madame Taillet, un portrait authentique, original, — et une copie du même, portant la mention « copié par Éliza Bosc[4], 1827 ».
Le portrait de Rosière semble donc bien être le « dessin original, de la plus parfaite ressemblance dont Barrière, renseigné par Bosc, priait en 1827, et que Mademoiselle Godefroid devait reproduire.
- ↑ Nous avons là le nombre des portraits faits du vivant de Madame Roland.
- ↑ Dans sa 3e édition des Mémoires. Il avait donné la première en 1820.
- ↑ Voir sur elle une note de la lettre 556. Ajoutons que, particulièrement liés avec Madame Champagneux, elle a exposé, aux salons de 1831 et 1847, au moins huit portraits des personnes de sa famille. Elle avait donc, si l’on peut s’exprimer ainsi, la tradition domestique, élément précieux.
- ↑ C’est la fille aînée de Bosc, Floréal, dite Élize, mariée depuis à M. Pilastre de la Brardière, fils du Girondin.