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gaient guère (voir lettre 418), et nous avons déjà remarqué que l’esprit de suite n’était pas sa qualité maîtresse[1].

Les événements de France hâtèrent son retour, la Constituante, considérait son œuvre comme achevée, s’était décidée à convoquer « la première Législative » et avait invité les assemblées primaires à se réunir du 12 au 15 juin pour nommer les nouveaux représentants. Bancal, qui voulait se porter à Clermont, quitta précipitamment l’Angleterre. Son départ de Londres doit être du 2 juin.


§ 6. Retour à Clermont.

Il ne fit guère que traverser Paris. C’est dans ce rapide séjour que se placent les lettres 430 et 431 de la Correspondance. Le 20 juin, il était déjà à Clermont et trouvait les Amis de la Constitution scindés en deux sociétés, séantes l’une aux Jacobins, l’autre aux Carmes. La nouvelle de la fuite de Varennes, qui rendait l’union plut nécessaire que jamais aux patriotes, lui permit de réconcilier les deux groupes (Mège, p. 34 et suiv.) ; dans une motion des 23 et 24 juin, « il se déclara ouvertement pour la République, sans toutefois en prononcer le nom ». (Ibid.) Le Patriote du 3 juillet donna un extrait de son discours.

Ce même jour (3 juillet), Bancal faisait une nouvelle motion contre la royauté et, en même temps, s’élevait avec force contre le décret du 24 juin qui venait de suspendre les élections et d’ajourner les assemblées primaires. Il n’était pas revenu de Londres pour voir ainsi ses espérances en échec ! Le 14 juillet, il fait signer à sa société une pétition demandant à l’Assemblée de rapporter son décret (Mège, p. 42), et la fait publier dans le Patriote du 20. Le 19, il se fait donner, par une « assemblée des citoyens libres de Clermont », mandat d’aller poursuivre à Paris ces revendications et de réclamer en même temps « la convocation prochaine des assemblées électorales », en portant une pétition, datée du même jour, plus impérieuse que celle du 14 (Mège, p. 43 ; collection Picot), et que le Patriote du 30 reproduisit.

Il ne faut pas croire que Bancal, en prenant ainsi l’offensive, eût avec lui tous ses concitoyens. Les pièces publiées par M. Mège (p. 179-190) montrent que la municipalité et tous les corps administratifs étaient au contraire fort mécontents, et, doctrine politique à part, on se l’explique fort bien. En se mettant à la tête du parti avancé, Bancal, que les élections locales de 1790 avaient laissé à l’écart, ne travaillait pas seulement contre la royauté : il préparait aussi sa propre revanche.

Il semble n’être parti de Clermont pour Paris qu’avec un retard de quelques jours, car Madame Roland lui écrit encore le 22 juillet, et c’est seulement le 29 qu’il se présenta, avec sa pétition, à la barre de l’Assemblée constituante.

Il fut mal reçu. Depuis l’affaire du Champ-de-Mars (17 juillet), l’Assemblée n’était disposée à tolérer ni qu’on attaquât la royauté, ni qu’on l’invitât elle-même à s’en aller. De plus, Gaultier de Biauzat, député de Clermont, avocat des autorités locales, oubliant ses

  1. Il fit pourtant envoyer, le 18 avril, aux Amis de la Constitution de Clemont, une adresse par la Société de la Révolution [de 1688] qui existait à Londres (Mège, p. 32).