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vernement. Si le sieur Roland connaissait mieux la ville, il aurait appris, avec tous les citoyens, à respecter le magistrat à qui il vient de manquer. Le manquement d’égards envers le chef d’un corps retombe sur le corps lui-même. C’est pourquoi nous vous supplions, Monseigneur, de faire donner à M. le maire la satisfaction convenable, et vous jugerez que cette satisfaction doit être aussi publique que l’est devenu le défaut d’égards du sieur Roland. Nous vous demandons cette satisfaction en notre nom ; nous vous prions très instamment aussi de rappeler à M. Roland les principes, les devoirs et les bornes de sa place, afin qu’il s’y maintienne avec soumission, subordination, diligence, vigilance et exactitude. 7 novembre.

Cette fois encore, l’administration ferme et intelligente de Trudaine se prononça pour l’Inspecteur contre l’autorité locale :

Invent. des Archives d’Amiens, AA 33, fol. 166. — De M. Trudaine aux officiers municipaux, au sujet de l’emprisonnement d’une ouvrière de la manufacture de M. Morgan. Il ne peut qu’approuver la conduite de l’inspecteur des manufactures, M. Roland de La Platière, en faveur de cette ouvrière, et pour rendre publique la mécanique importée d’Angleterre par M. Morgan pour faire filer les matières destinées à sa manufacture de velours de coton. 25 novembre.

Et c’est trois jours après, le 28 novembre, que Trudaine envoyait à Roland, à propos de son rapport sur le voyage en Allemagne, une lettre de chaudes félicitations. Il n’y avait pas à s’y tromper : l’inspecteur d’Amiens était hautement avoué par Trudaine, et il fallait compter avec lui.

Le moment approchait où Roland allait rencontrer la femme supérieure qui devait tenir tant de place dans sa vie ; en relations à Amiens avec la famille des demoiselles Cannet, déjà il avait dû, en décembre 1774, se rendant à Paris, se charger d’une lettre de Sophie pour Marie Phlipon (voir Lettres Cannet, 20 décembre 1774) ; mais c’est en décembre 1775 seulement, après son voyage d’Allemagne (Mémoires, II, 225, et lettre à Bosc du 13 août 1784) ou même, plus exactement, en janvier 1776 (Mémoires, II, 218, et Lettres Cannet, 11 janvier 1776) qu’il se présenta au logis du quai de l’Horloge.

Sur ses rapports avec la fille du graveur, dans ces premiers mois de 1776, nous ne pouvons que renvoyer à notre Étude sur « Marie Phlipon et Roland » (Révolution française du 14 mai 1896). Rappelons seulement que, cette année-là, Roland prolongea beaucoup son séjour à Paris ; trois mois entiers, dit-il dans sa Réponse au pamphlet de Holker. C’était le moment de sa première « crise » avec le manufacturier de Saint-Sever ; il préparait son mémoire sur l’Art du fabricant de velours de coton ; il s’apprêtait aussi à sa mission d’Italie que Trudaine venait de lui confier.

C’est dans un de ses rapides retours à Amiens qu’il adressa à l’Intendant de Picardie, le 19 juillet 1776, un rapport sur les papeteries, demandé par Turgot (Invent. des Archives de la Somme, C. 343).

Nous le voyons aussi, à cette époque, correspondre avec l’Intendant au sujet de ses « appointements ». Les « appointements » des inspecteurs des manufactures étaient fournis par les communautés de métiers ; ils étaient plus considérables dans les pays d’Élection, comme la Picardie, que dan les pays d’États, tels que le Languedoc. La communauté des marchands drapiers d’Abbeville aurait voulu être dispensée de payer sa part contributive, qui