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L’administration de la police, à laquelle le ministre avait écrit à mon sujet, ayant répondu qu’elle n’avait agi que d’après les ordres du Comité de Sûreté générale de la Convention, le ministre s’est adressé à ce comité pour réclamer la loi qui exige que les détenus soient informés du délit dont ils sont prévenus et interrogés dans le plus court délai. Le Comité a fait une réponse dont je joins ici la copie, elle expose ses motifs et ses griefs contre moi ; c’est elle-même que j’offrirais aux personnes impartiales pour ma justification, si elle était nécessaire. Il ne sera pas difficile de reconnaître que cette réponse est absurde quant au fond des choses ; je laisse à juger si elle est décente quant à la forme. Elle établit mon arrestation sur l’absence de mon mari, comme s’il était des lois qui permissent jamais de prendre une personne pour une autre ; elle l’établit encore sur ma complicité du prétendu projet de pervertir l’opinion publique, comme si la responsabilité d’un ministre s’étendait sur son épouse ; elle porte, dans tous ses points, sur de fausses accusations contre un autre individu que celui pour lequel il était fait des réclamations.

Roland n’est point à Lyon, et je défie ceux qui le calomnient de justifier leur dire imposteur ; il pourra le prouver quand il en sera temps. Il ne souffle nulle part le feu de la guerre civile. Roland a sollicité, durant cinq mois, l’apurement de ses comptes, le jugement de sa conduite publique et privée ; toutes les pièces nécessaires étaient entre les mains de l’Assemblée. Cette justice lui a été obstinément refusée : on voulait donc le retenir pour l’arrêter dans un moment prévu ? Il a donc dû se soustraire à cette inique arrestation, et il ne l’a fait qu’à la dernière extrémité. Roland, loin de corrompre l’esprit public, n’a cessé d’obéir au décret qui lui ordonnait de concourir à l’éclairer par des écrits tous connus et avoués ; que l’on cite un seul de ses écrits qui ne contienne pas les principes de la plus pure morale et de la plus saine politique !

Roland a exigé des comptes de ceux à qui il devait en demander, parce qu’il en rendait lui-même de très rigoureux ; Roland s’est élevé contre tous les actes de violence qui offensaient les lois et blessaient l’humanité, parce qu’il a cru qu’après le renversement de la tyrannie rien n’était plus pressant que de faire chérir la liberté par un régime équitable et d’appuyer la République sur des

    vaient faits, le 24 juin, les commissaires de la section Beaurepaire, pour s’opposer à la seconde arrestation de Madame Roland. On en verra le détail dans le procès-verbal qu’ils firent dresser, et qui a été publié par M. Faugère, I, 395-398. L’original, après avoir passé par plusieurs ventes, appartenait au regretté M. Étienne Charavay et a figuré à la vente de sa collection, troisième vente, no 968, 17-18 mai 1901.