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[À BANCAL, À CLERMONT[1].]
23 mars 1792, — [de Paris].

Je vous donnerai de mes nouvelles avant d’avoir reçu des vôtres. Je voudrais être la première à vous faire connaître nos nouveaux ministres ; mais j’aurai peut-être été devancée, car l’heure du courrier est passée,

M. Dumouriez est aux Affaires étrangères ;

M. de Grave[2], à la Guerre ;

M. Lacoste, à la Marine ;

M. Clavière, aux Contributions publiques ;

M. Garnier, à la Justice (il a refusé) ;
(À la place de celui-ci, il est question de vous très fortement.)

M. Roland, à l’Intérieur.

Vous serez étonné autant que lui sans doute. Il se dévoue courageusement, prêt à quitter s’il ne peut faire le bien. Il parait que le patriotisme et la bonne intelligence régneront dans le ministère et l’uniront à la saine partie de l’Assemblée nationale ; mais les sous-ordres sont détestables, c’est à la fois un repaire et un labyrinthe ou des écuries comparables à celles d’Augias.

Le petit appartement de la rue de La Harpe continue de s’arranger ; c’est une

  1. Lettres à Bancal, p. 339 ; — ms. 9534, fol. 176-177.

    Bancal, qui était encore à Paris le 11 mars (Aulard, III, 432), venait de retourner à Clermont (Mège, p. 50). — Sur la date de cette lettre, même observation que pour la précédente.

  2. Le marquis de Grave, maréchal de camp, avait succédé à Narbonne le 9 mars. (Il est surprenant que Madame Roland l’annonce à Bancal, qui était encore à Paris le 11.) Démissionnaire le 8 mai, il émigra à Londres et, de là, adressa au Roi, le 8 août, une lettre compromettante qui, arrivant à Paris après le 10, dut être saisie [Elle se trouve aujourd’hui aux Papiers Roland, ms. 9532, fol. 232-234). C’est pour cela sans doute que Cambon le fit décréter d’accusation le 27. Il mourut pair de France en 1823. — Voir sur lui les Mémoires, I, 70-71 et 267.

    Sue Jean de Lacoste (1730-1820), ministre de la Marine le 15 mars, démissionnaire le 10 juillet, voir les Mémoires, I, 71 et 269.

    Germain Garnier (1754-1821) avait été député suppléant du Tiers de Paris pour les États généraux, puis un des chefs du « Club des Impartiaux ». Il était alors membre du département de Paris.