Je suis chargée de mille et mille amitiés pour toi. On a trouvé fort plaisante ta lettre de change dont j’étais la marchandise, et on l’accepte de grand cœur.
Je t’aime et t’embrasse bien tendrement ; écris-moi, ménage-toi et souviens-toi pour cela de moi qui m’inquiète de tes embarras et qui souffre de ne point les partager.
P. S. Depuis ma lettre écrite et fermée, j’ai revu M. Justamont. Je l’ai mis de nouveau sur le chapitre d’hier ; il m’a assurée qu’indépendamment des exemplaires de tes lettres envoyés à MM. les Intendants du commerce et dans ta famille, il y en avait dans d’autres mains, et que certainement on ferait une édition si la tienne tardait à paraître. Fais tes diligences et agis d’après cela.
J’ai la tête un peu fatiguée et j’ai grand besoin de t’écrire à loisir dans l’effusion de mon cœur. Adieu, je t’embrasse de nouveau et suis toute à toi.
À ROLAND, À AMIENS[1].
Tu as su, mon bon ami, mon heureuse arrivée dans cette ville, et j’ai pu, sans inconvénient, attendre que la fatigue et l’étourdissement du voyage commençassent à se dissiper pour m’entretenir avec toi. Mieux que je n’aurais espéré l’être en arrivant, quant à la santé, je n’étais pas encore aussi bien qu’il aurait été possible, et c’est à présent seulement que je suis en droit de te donner à cet égard toutes les assurances nécessaires à ta satisfaction. Aussi je ne me donne pas le temps de recevoir ta lettre, dont j’ai cependant le plus grand besoin, pour te faire part de ce qui me concerne.
- ↑ Ms. 9533, fol. 69-71. – La date du 28 ne peut être qu’une distraction de plume de Madame Roland, car il suffit de comparer avec la précédente pour voir qu’elle est postérieure d’un ou de deux jours.