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moment, des intérêts plus importants encore méritent qu’on les préfère. Les élections étant suspendues, si vous veniez ici, nous pourrions suivre l’encouragement des sociétés populaires. C’est un des sujets les plus intéressants à traiter maintenant, et je vous offrirais de publier ensemble l’ouvrage que j’ai préparé sur cette matière. Il se ferait temps aussi que nous vissions si nous exécuterons quelque chose de ce dont il a été question entre nous et Brissot. M. Roland ne serait point éloigné d’y prendre part, afin de se faire une existence indépendante à Paris. Si vous pouvez venir nous retrouver bientôt, ce sera bien.

J’ai pressé ici pour qu’on profitât de la suspension que l’on a mise aux élections, et qu’on passât deux décrets nécessaires pour assurer leur bonté, — savoir, un pour le scrutin épuratoire de quatre listes, et l’autre pour que l’on puisse, dans chaque département, choisir les citoyens éligibles de tout le royaume. Sans doute, dans les circonstances, l’Assemblée nationale aurait dû s’élever et détruire tous les mauvais décrets qu’on lui a fait porter, le marc d’argent et toutes les distinctions qui restent entre citoyens, etc. ; mais, au moins, devrait-on obtenir ceux-là sur les élections. Cependant je n’ai pu persuader à nos patriotes d’en faire la motion. Cela vaudrait bien la peine qu’on fit des départements des pétitions. — Au scrutin épuratoire il y aurait une perfection à ajouter, que Brissot trouvait très juste : c’est de faire signer par chaque électeur ses listes après la première, afin que chacun fût pressé de composer sa liste de bons choix, ou au moins d’y mettre quelques hommes de mérite ; on se rapprocherait ainsi de la manière de voter que Rousseau trouvait la plus digne d’un peuple libre. Si on joignait à cela les discussions et scrutins préparatoires dans les Sociétés patriotiques, on serait assuré d’obtenir les meilleurs choix. Salut[1] !


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À M. H. BANCAL, [À CLERMONT[2].]
1er juillet au soir 1791, — de Paris.

Ma lettre était partie lorsque la vôtre m’est parvenue ; nous avons lu cette dernière avec le plus vif intérêt : vos sentiments, vos idées s’accordent si parfaitement avec les nôtres, que leur expression nous plaît et nous anime en même temps. Brissot vient d’emporter et votre lettre et votre motion imprimée pour en faire usage ; cependant, en publiant une partie de votre lettre, il la supposera d’un autre lieu que de Clermont, car il faut à la fois effrayer l’Assemblée par la peinture de l’énergie des peuples, et éviter qu’elle voie si bien ceux qui peuvent la développer qu’elle sache à qui s’en prendre pour arrêter

  1. Bosc a ajouté : « Me voilà de retour, mais très occupé. Je vous écrirai sous peu. Je vous embrasse. Louis Bosc. »
  2. Lettres à Bancal, p. 265 ; – ms. 9534, fol. 136-138. Pas d’adresse ; mais, dans un coin : « H. Bancal. »