éans, Chapelier, Castellas[1] et autres 89 demandant à être reçus, en abrégeant les formalités pour mieux seconder leur empressement ; ils improuvaient Robert qui vantait la République, ils écoutaient Danton dont la vigueur, ou fausse ou peu éclairée, ne trouvait d’expédient que dans une régence[2]. Cependant le lâche Comité de constitution, le perfide Thouret[3], présentent un projet de décret contenant quelques mesures d’après l’enlèvement du Roi, pour assurer la tranquillité de sa personne jusqu’à sa réunion au Corps législatif : prononçant des peines contre ceux qui oseraient l’insulter, etc… Observez qu’on a envoyé Petion au-devant du Roi, que Buzot sort de maladie et peut a peine se faire entendre, que la permanence de l’Assemblée, entraînant beaucoup de fatigue, oblige ses membres à s’absenter par moments. Heureusement Robespierre rentrait dans la salle ; il s’élève avec son énergie ordinaire, on l’arrête, et l’on suspend l’Assemblée pour quelques heures.
Quant à nous, voici ce que nous pensons et ce que nous disions à Buzot après minuit. Remettre le Roi sur le trône est une ineptie, une absurdité, si ce n’est une horreur ; le déclarer en démence, c’est s’obliger, d’après la Constitution qui a prévu le cas, à nommer un régent ; nommer un régent serait non seulement confirmer les vices de notre Constitution dans un moment où l’on peut, où l’on doit les corriger, mais encore ouvrir les voies à la guerre civile : qui nommeriez-vous, de ceux que votre loi d’hérédité appelle à cette régence ? — Monsieur ? — d’Artois ? — Condé ? — ou d’Orléans, qui n’y a pas un droit rigoureux, qui est vicieux et méprisé, qui discréditerait votre opération et ferait soulever les provinces ? Faire le procès à Louis XVI serait, sans contredit, la plus grande, la plus juste des mesures : mais vous êtes incapables de la prendre, et il ne faut pas raisonner sur des hypothèses. Eh bien, mettez-le non en interdit proprement dit, mais en suspend, comme on faisait autrefois des magistrats qui avaient prévariqué ; c’est bien le moins que votre délégué, trahissant tous ses devoirs, soit suspendu de ses fonctions jusqu’à plus mûr
- ↑ Jean-Antoine de Castellas (1735-1801), député du clergé de Lyon à la Constituante. — Madame Roland doit faire erreur ici. Ce qu’on sait du rôle de Castellas ne permet guère de se le représenter allant aux Jacobins.
- ↑ Voir dans Aulard, II, 344-348, le compte rendu de cette séance, où la faction d’Orléans chercha, en effet, à profiter du désarroi causé par la fuite de Louis XVI. Remarquons une fois pour toutes que ces lettres complètent utilement les comptes rendus publiés par M. Aulard. Dans celui du 23 juin, par exemple, il n’est question en aucun endroit de Robert et de sa motion républicaine.
- ↑ Jacques-Guillaume Thouret (1746-1794), député du Tiers de Rouen.