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son lit. Bon courage ! ce sera là le résultat des cadeaux de mon maître ; sans récompense, rien n’arrive à bonne fin.

Calixte. Ne néglige rien.

Sempronio. Et faites de même, jamais maître négligent ne rendit valet diligent.

Calixte. Comment penses-tu parvenir à me rendre service ?

Sempronio. Je vais vous le dire. Il y a longtemps que je connais dans le voisinage une vieille barbue qui se fait appeler Célestine : c’est une rusée sorcière, habile à toute espèce de méchanceté. Je crois qu’on peut élever à cinq mille le nombre de virginités qui ont été faites et défaites par son autorité dans cette ville. Si elle le voulait, elle exciterait à la luxure et pousserait l’une vers l’autre les pierres les plus dures.

Calixte. Pourrai-je lui parler ?

Sempronio. Je vous l’amènerai ici. Préparez-vous à sa visite ; soyez avec elle gracieux et généreux surtout, et, pendant que je vais la chercher, disposez-vous à lui dire votre peine aussi clairement qu’elle vous en indiquera le remède.

Calixte. Ne tarde pas.

Sempronio. Je pars, Dieu vous garde !

Calixte. Qu’il t’accompagne !

Calixte, seul. Ô Dieu tout-puissant et éternel ! toi qui guides les hommes égarés, toi qui envoyas une étoile pour amener à Bethléem les rois de l’Orient et les reconduire dans leur patrie ! je te conjure humblement de guider mon Sempronio de telle manière qu’il puisse changer en joie ma peine et ma tristesse, et me conduire, moi indigne, au but que je désire tant !


Célestine. Bonne nouvelle20, Élicie, bonne nouvelle ! voici Sempronio.

Élicie. Chut, chut, silence !

Célestine. Pourquoi ?