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de ses amants. Dans la maison où elle entre demeure une jolie femme, fort gracieuse et fraîche, amoureuse, un peu galante ; on l’appelle Areusa. Je sais que le pauvre Parmeno passa pour elle plus de trois mauvaises nuits, et qu’elle, non plus, n’est pas trop contente de sa mort.




ACTE QUINZIÈME112


Argument : Areusa dit des paroles injurieuses à un rufian nommé Centurion, qui la quitte en entendant venir Élicie. Celle-ci rend compte à Areusa des morts qui ont été la suite des amours de Calixte et de Mélibée. Areusa et Élicie conviennent que Centurion devra venger la mort des trois victimes sur les deux amants. Élicie prend congé d’Areusa, ne consentant pas à ce qu’elle lui demande, parce qu’elle ne veut pas perdre le bon temps dont elle jouit chez elle.


ÉLICIE, AREUSA, CENTURION.

Élicie. Qui cause ces cris chez ma cousine ? Si elle a su la triste nouvelle que je lui apporte, je n’aurai pas les étrennes de sa douleur que gagne toujours un tel message. Qu’elle pleure, qu’elle pleure, qu’elle verse des larmes, car on ne trouve pas de tels hommes à chaque coin ; il me plaît qu’elle le sente ainsi. Qu’elle s’arrache les cheveux comme j’ai fait, moi, malheureuse ! qu’elle sache qu’il est plus cruel de perdre une bonne vie que de mourir soi-même. Oh ! combien je l’aime maintenant plus que je ne l’ai aimée ; à cause du grand chagrin qu’elle témoigne !


Areusa. Va-t’en de chez moi, rufian, coquin, menteur, trompeur ! Tu veux te jouer de moi ; tu me crois donc bien sotte, que tu penses me prendre à tes fausses protestations ? C’est avec tes bravades et tes cajoleries que tu m’as volé tout ce que j’avais. Je t’ai donné,