avec moi sur ce chemin si désiré ; je leur ferai prendre une échelle, car les murailles sont élevées. Demain je feindrai de venir du dehors ; je vengerai si je puis ces deux malheureux ; sinon, je justifierai de mon innocence en prouvant que j’étais absent, ou bien encore je ferai le fou pour mieux jouir de l’incomparable bonheur de mes amours ; comme fit le capitaine Ulysse, pour éviter la guerre de Troie et vivre heureux auprès de Pénélope, sa femme.
ACTE QUATORZIÈME
Mélibée. Il tarde bien ce cavalier que nous attendons ; que crois-tu ou que soupçonnes-tu de ce retard, Lucrèce ?
Lucrèce. Madame, qu’il y a un juste empêchement et qu’il n’est pas en son pouvoir de venir de suite.
Mélibée. Que les anges veillent sur lui, que sa personne soit sans péril ; son retard ne me donne pas de peine. Mais, hélas ! je pense à beaucoup de choses qui peuvent lui arriver depuis sa maison jusqu’ici. Qui sait si, avec la volonté de venir au rendez-vous convenu, et déguisé comme le sont à pareille heure les jeunes gens de sa classe, il n’a pas été rencontré par les alguazils de nuit et si ceux-ci ne l’ont pas attaqué sans le