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selon les mérites de chacun. S’il m’a donné quelque chose, à moi, j’ai joué deux fois ma vie pour lui ; j’ai usé plus que vous de souliers et d’effets à son service. Vous devez bien penser, mes enfants, que tout cela me coûte de l’argent ; je n’ai pas non plus acquis mon savoir sans peine. La mère de Parmeno, Dieu veuille avoir son âme ! pourrait bien en être témoin. Ce que j’ai, je l’ai gagné ; ce que Calixte vous doit, c’est à vous qu’il le donnera ; tout cela était pour moi peine et devoir, pour vous plaisir et passe-temps. Aussi n’avez-vous pas droit, pour vous être amusés, à la récompense que j’ai acquise en travaillant. Toutefois, malgré ce que je vous dis, si ma chaîne se retrouve, ne me refusez pas d’accepter chacun une paire de chausses écarlates, c’est le vêtement qui va le mieux aux jeunes gens. Si vous n’accueillez pas mon offre, je me tairai sur ma perte ; ce que j’en fais est de bonne amitié. Vous devriez voir avec plaisir que j’eusse plutôt qu’une autre le bénéfice de cette affaire ; ce serait agir contre vos intérêts que ne pas en être contents.

Sempronio. Ce n’est pas la première fois que j’ai remarqué à quel excès est poussé chez la vieillesse ce vice de cupidité ; quand elle est pauvre, elle est généreuse ; quand elle est riche, elle est avare. La cupidité s’accroît à mesure qu’on acquiert, la pauvreté s’augmente à mesure qu’on devient cupide. Rien n’appauvrit l’avare comme la richesse. Ô Dieu ! comme les besoins naissent avec l’abondance ! Cette vieille me disait de prendre pour moi, si je le voulais, tout le profit de cette affaire ; elle pensait alors que ce serait peu de chose ; maintenant qu’il dépasse ses espérances, elle ne veut rien donner, pour se montrer fidèle à cette maxime des enfants : « Du peu tu auras peu, de beaucoup rien. »

Parmeno. Qu’elle te donne ce qu’elle a promis, ou bien nous prendrons tout. Je te disais bien ce qu’était cette vieille ; si tu avais voulu me croire…

Célestine. Si vous êtes en colère par votre faute,