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Dieu, madame, permettez que j’appelle mes serviteurs pour qu’ils les mettent en pièces.

Parmeno. N’entends-tu pas, Sempronio ? Il veut venir nous chercher pour qu’il nous arrive malheur. Je ne suis pas du tout content d’être ici ; je crois que ces amours ont mal commencé, je n’attends pas davantage.

Sempronio. Silence ! tais-toi, écoute, elle ne veut pas que nous y allions.

Mélibée. Voulez-vous donc, mon bien-aimé, me perdre et compromettre ma réputation ? Ne lâchez pas la bride à votre volonté ; l’espérance est certaine, le temps serait trop court pour ce que vous ordonnerez. Vous ressentez une vive peine, et moi celle de nous deux ; vous souffrez de votre seule douleur, et moi de la vôtre et de la mienne ; ayez patience jusqu’à demain et venez à la même heure par les murs de notre verger. Si maintenant vous brisiez cette cruelle porte, en ce moment nous serions entendus, et demain il naîtrait dans la maison de mon père un terrible soupçon sur ma faute. Et comme vous sentez que le tort grandit en proportion de l’état de celui qui le commet, on en parlerait dès le jour dans toute la ville.

Sempronio. Notre mauvaise étoile nous a conduits ici cette nuit, nous allons rester là jusqu’au matin, selon que notre maître en prend à son aise, et bien que le bonheur nous favorise, on finira par nous entendre d’ici ou des maisons voisines.

Parmeno. Il y a deux heures que je te prie de partir, nous n’éviterons pas une correction.

Calixte. Oh ! madame et tout mon bien, pourquoi appelez-vous faute ce que tous les saints du paradis m’ont accordé ? Je priais aujourd’hui devant l’autel de la Madeleine, lorsque cette brave femme vint me rejoindre avec votre doux message.

Parmeno. Tu divagues, Calixte, tu divagues. Je