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Célestine. Donnez-moi mes étrennes et je vous le dirai.

Calixte. Oh ! pour Dieu ! prends toute cette maison, tout ce qu’elle renferme, parle, demande ce que tu voudras.

Célestine. Pour une mante que vous donnerez à la vieille, elle déposera entre vos mains ce même cordon qui ceignait la taille de Mélibée.

Calixte. Que parles-tu de mante ? Mante, robe et tout ce que j’ai.

Célestine. J’ai besoin d’une mante, et cela me suffira. N’allez pas plus loin et n’ayez pas mauvaise opinion de ma demande ; on dit qu’offrir beaucoup à celui qui demande peu, c’est une espèce de refus.

Calixte. Cours, Parmeno, appelle mon tailleur, qu’il lui coupe à l’instant une mante et une robe de ce drap fin qu’on a apporté pour faire friser67.

Parmeno, en bas. Bon, tout à la vieille, parce qu’elle vient chargée de mensonges comme une abeille, et rien à moi, qu’on fait toujours courir. Elle n’a pas pensé à autre chose depuis ce matin avec ses allées et venues.

Calixte. Que veut ce démon ? Il n’y a certes pas au monde un homme aussi mal servi que moi, jamais je n’ai vu des valets grognons, malintentionnés, se mêlant de tout comme ceux-là. Que murmures-tu, coquin, envieux ? Que dis-tu ? je t’entends à peine. Va où je t’ordonne et ne m’irrite pas ; j’ai bien assez de ma peine pour me pousser à bout ; hâte-toi, on trouvera bien aussi une casaque pour toi dans cette pièce.

Parmeno. Je ne dis pas autre chose, seigneur, sinon qu’il est trop tard pour trouver le tailleur.

Calixte. Ne t’ai-je pas dit que tu te mêlais de tout ? Alors ce sera pour demain. Et toi, ma mère, aie patience par amour pour moi : ce qui est différé n’est pas perdu. Fais-moi voir ce cordon bénit digne de