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VI.

Une mère.

Je suis assise dans ma douleur, j’attends le matin dans les larmes.
Colma, (Ossian)



Noëmi n’avait prêté qu’une attention assez ordinaire à la scène précédente. Le délit singulier dont les nègres de houe venaient d’accuser Zäo lui semblait la conséquence ordinaire de ses conversations avec le vaudou ; elle était convaincue que cet homme l’avait fanatisé, qu’il lui avait jeté ce qu’on appelle au pays un ouanga, sortilége qu’il ferait cesser à sa prière dès qu’elle le rencontrerait.

Cette idée la rassurait presque sur le sort de Zäo, dont le jeune âge devenait, du reste, la meilleure excuse. Il faut le dire aussi, et le lecteur a pu s’en apercevoir à certains traits épars dans nos premières pages, Noëmi avait accepté Zäo, le fils de sa sœur, plutôt comme un fardeau pour sa misère que comme un bienfait. C’était le mulâtre qu’elle chérissait pardessus tout, le mulâtre plus leste mille fois et plus adroit que Zäo, dont l’intelligence n’allait pas au delà de l’humilité et de la superstition envers le jon-

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