sures de ses prédécesseurs lui parurent mauvaises ; ce qu’elles avaient de pis, à ses yeux, c’était l’arbitraire ; plusieurs avaient dépassé leurs instructions. Il veilla à ce que les siennes fussent précises, afin que son attitude dans la colonie fût claire. Il ignorait que contre l’incertitude des lois, le règne des gens oisifs et des gens malhonnêtes, il n’y a pas de remède possible.
M. le prince de Rohan arrivait donc dans la colonie avec les intentions les plus fermes, il y fut obéi mais détesté. C’était une chose trop extraordinaire à coup sûr que cette sévérité résolue pour qu’elle n’excitât pas des murmures. M. de Rohan recevait depuis quelque temps des lettres sous le voile de l’anonyme, lettres qui n’étaient que des menaces. Il y était parlé à mots couverts de ligues sourdes, de pièges, d’empoisonnemens. Le prince méprisa ces lettres, déterminé qu’il était à faire son devoir et à ne pas donner prise contre lui aux courtisans. Il résidait, nous l’avons dit, dans la partie de l’ouest, composée de Léogane, de Saint-Marc et du Port-au-Prince. La plaine de l’Artibonite était de sa dépendance, et à ce titre la châtelaine par intérim de la Rose, la belle marquise de Langey, le recevait souvent comme son maître et seigneur.
La physionomie de M. de Rohan conservait le caractère distinctif des portraits de sa maison, de belles lignes nobles, un air impératif, une couleur pâle sillonnée de grandes veines bleues ; il avait de l’éclat dans le regard, les dents belles, les façons hautes. On le disait présomptueux et magnifique,