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TIO-BLAS.

En ce moment l’horloge de la chambre sonnait deux heures du matin.

— Allons, senora, votre main dans la mienne et le pied à l’étrier ! s’écria-t-il comme s’il fût sorti d’un rêve.

— Jamais ! oh ! jamais ! reprit-elle ; tu me fais horreur !

— Deux heures viennent de sonner. Vous emporterez vos diamans : cela sera bientôt fait.

— Je suis maîtresse ici, Tio-Blas ! Songez que je n’ai qu’à jeter un cri, l’on viendra.

— Vos gens sont à la veillée…

— Vous voulez donc me voir briser le front contre ce mur ?

— Vous n’en ferez rien : cette main vous tient sans colère, vous le voyez…

— Encore un coup, lâchez-moi. Je vous dis que vous êtes un assassin !

— Et moi, je te dis, femme, que nos deux destinées doivent être unies à jamais comme le sont nos deux mains. Tu dois marcher avec moi, car tu es une femme perdue… Entre nous s’élève quelque chose, marquise de Langey ou comtesse de Cerda, c’est une colonne de sang ! Allons, marche, marche !

Il tira en même temps son sifflet d’ivoire et le porta à ses lèvres — La marquise comprit qu’elle était perdue…

— Infâme ! cria-t-elle en dégageant son bras de celui de l’Espagnol par un effort surhumain, ne fais pas un mouvement, ou je mets le feu à ma moustiquaire…