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UN MENUET

poussé un grand cri en voyant Mlle Agathe avec M. Glaiseau sur la terrasse. Glaiseau avait servi M. de Boullogne, et nos lecteurs savent quels rapports existaient entre M. de Boullogne et Maurice. Après avoir bataillé avec le concierge l’espace de quelques jours, le marquis avait eu le plaisir de le voir se rendre à discrétion et se charger de remettre lui-même à Mlle Agathe une épître des plus pressantes. La candeur de ce billet avait ému le cœur d’Agathe ; il lui sembla (et elle ne s’abusait point) que son auteur était de ces hommes qui ne deviennent entreprenans que lorsqu’ils sont aimés. Elle n’hésita point à le recevoir : il y a certaines confiances qui honorent réciproquement ceux qui se les accordent. Le marquis de Langey vit donc Glaiseau lui ouvrir les portes de l’hôtel.

Maurice avait alors vingt-trois ans. Il était beau de la beauté d’une femme ; mais aussi, élevé par elles, il était loin d’avoir gagné du côté de la force et du développement physique. La délicatesse du créole s’était accrue par toutes les habitudes et les raffinemens du luxe. Adulé par sa mère, encouragé par la faiblesse aveugle de M. de Boullogne, héritier d’un beau nom et pouvant prétendre à tout, il avait conservé l’orgueil traditionnel de son enfance. Son mépris pour les parvenus n’ayant rencontré que trop d’occasions de se produire, il en était résulté chez lui une sorte de misanthropie hautaine.

Pendant quelque temps, il avait pris la solitude et la campagne en une sorte d’amour : il chassait à Brevannes avec une assez belle meute… Dans ce châ-