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LE PALAIS-ROYAL

galerie précédant tous les salon, autant le bruit des voix et des instrumens emplit les feuillages verts et les cafés.

Entre toutes les autres, une voix pure et fraîche s’élève ; elle est accompagnée d’une guitare dont les notes arrivent à l’oreille avec les frais bruissemens des jets d’eau et les odorantes senteurs de la grande pelouse.

— C’est Alsevédo qui chante, dit Saint-Georges, écoutons-le !

Un clair de lune ravissant blanchissait alors les allées ; il n’y avait qu’une ruasse noire au milieu du jardin, c’était le cirque du Palais-Royal.

De la fenêtre où la compagnie se trouvait placée le regard embrassait le cadre illuminé des bâtimens, dont les belles lignes rappellent celles des Procuraties de Venise. Un ciel d’un bleu vif, troué çà et là de scintillantes étoiles, semblait sourire amoureusement au jardin, où couraient des lueurs mystérieuses. Vus de ce balcon, les quinconces régulièrement taillés semblaient une bande de soie verte sur laquelle sautaient quelques linottes et des pinsons assez hardis pour écouter les chanteurs du haut de ce trône aérien.

Il était difficile de se défendre contre le charme enivrant de pareille soirée… Une brise tiède et fine dérangeait mollement les écharpes de toutes ces femmes assistant à ces représentations improvisées, dont Saint-Georges et Garat prirent eux-mêmes leur part à des temps moins éloignés. À juger des objets par la sensation qu’ils soulèvent, ce jardin rempli de filles d’Opéra et de Galathées peu curieuses de se cacher,