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RÉFLEXIONS.

qu’il venait de faire ; il trouva la récompense de son action dans son amour ! Ne l’aimait-il pas déjà de toutes ses forces de son âme, cette belle Agathe qui avait rallumé chez lui tout un foyer de passion et de vie ? Ne rapportait-il pas dans cette chambre solitaire la douce odeur de ses cheveux, le contact de sa taille et de son bras ? N’était-ce donc pas lui qui l’avait sauvée de ces impures ténèbres ? n’était-ce pas lui seul qu’elle aimerait et qui oserait lutter contre un pareil vainqueur ?

Comme il se parlait ainsi à lui-même, il jeta les yeux sur la bague de la jeune fille… Une idée cruelle l’assiégea ; c’était à Maurice qu’Agathe avait cru remettre cette bague ; c’était à Maurice, non à Saint-Georges, que ses remercîmens s’adressaient.

— Serait-elle sa maîtresse ? se demanda-t-il avec rage.

Il chassa bientôt cette idée en évoquant le souvenir des propres paroles d’Agathe. Rien dans cette confidence, qu’elle croyait faire à Maurice, n’attestait que la jeune fille l’aimât avant qu’il ne l’eût sauvée…

— Maurice de Langey peut l’aimer, mais aimerait-elle cet enfant ? Où se cachait-il donc dans l’orage, ce faible roseau ? Sous quel vent, sous quelle crainte ployait-il ? Sans doute il m’était réservé de prendre partout sa place… Oh ! je me vengerai de ses dédains, je saurai bien l’écarter ! Puisqu’il ne m’a plus tendu la main comme autrefois ; que dis-je ? puisqu’il a repoussé la mienne, quel lien désormais existerait entre nous, si ce n’est celui de la haine ? Il sera