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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES

nir souper à ma petite maison de Pantin, reprit la Guimard roulant des yeux en coulisse, il pourra voir une statue en cire de Mme Dubarry qui vaut la belle demoiselle de ce sopha.

— Vous permettez, mon cher, que l’on baise du moins le bout du doigt à votre maîtresse, ne fût-ce que pour la réveiller. Nous y gagnerons tous, et vous peut-être le premier !

Le masque n’ayant fait aucun mouvement, le duc de Chartres enjamba lestement la table ; il se trouva en un clin d’œil aux pieds d’Agathe. Après lui avoir baisé la main à plusieurs reprises avec transport, le prince s’étonna de ne pas la voir s’éveiller ; il la contempla quelques secondes dans le recueillement de l’extase.

L’incomparable beauté de cette personne contrastait si fort avec celle des créatures attablées chez le financier que le prince, malgré sa soif de débauche, la respecta d’abord comme un prince des contes de fées. Ce sommeil d’un ange l’éblouit par tant de rayons qu’ils pénétrèrent un moment la boue de son âme… Peut-être aussi que la vue de ce masque l’intimida…… Agenouillé devant la jeune fille, il ne prenait plus part aux conversations du souper, dont la gaîté languissante s’était peu à peu ranimée. La chère et les vins avaient remis en effet les convives en belle humeur ; il n’y avait que de Vannes à qui l’on ne pût faire entendre raison au sujet du masque inconnu.

— Il m’a offensé, répliquait-il à Genlis ; il a levé les épaules !

— Il ne pouvait guère vous répondre autrement, puisqu’il a fait vœu de ne pas parler…