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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

de Saint-Georges ; ce sourire lui remit du baume au cœur.

Après avoir fermé les portes en dehors, les garçons montèrent sur les tables de marbre pour voir l’assaut ; en l’absence de M. Delatour, Mlle Isaure était seule maîtresse du café.

Le salut fini, les tireurs se mirent en garde. Le neveu de Mme Bertholet en savait juste assez pour croiser le fer dans un vaudeville s’il eût été comédien. En revanche, il ne manquait pas de cet aplomb provincial qui passe à l’œil de certains niais pour de la force. Plusieurs coups attaqués imprudemment par lui et disputés se succédèrent comme une balle de paume envoyée et renvoyée par la raquette. Saint-Georges fit semblant de suspendre un moment comme pour le laisser reprendre haleine ; dans le fait, il ne voulait que l’épargner.

À l’exemple de Saint-Georges, le neveu de Mme Bertholet avait remis le talon à la cheville gauche ; son alignement était passable ; il y eut un garçon de café qui l’admira.

Par un incroyable bonheur de sa nature, le neveu de Mme Bertholet était gaucher. Il n’avait jamais regardé cela que comme un défaut, il ignorait que c’était un avantage. Après s’être contenté de rompre son fer, Saint-Georges lui ménagea une riposte admirable, dont le provincial s’empara.

— Touché, monsieur, dit Saint-Georges en mettant la pointe en terre, vous m’avez touché ; je ne nie jamais un coup !

La stupéfaction fut générale. La Boëssière allait