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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

— Il a bien pu, lui, me jeter impunément devant tous des paroles de honte ; il faut qu’il les efface, et il ne peut les effacer qu’avec du sang !…

— Ainsi, monsieur, vous voulez commettre un assassinat ?

— Le marquis de Langey porte une épée, il doit savoir s’en servir, monsieur.

— Je la briserais entre ses mains, plutôt que de voir sa pointe se lever sur votre poitrine !…

— Vous prenez de moi un trop grand souci, monsieur le contrôleur général, je vous croyais mon ennemi, et non mon allié ; me permettrez-vous de m’étonner de ce tardif intérêt ?

— J’avoue mes torts, monsieur, jusqu’à ce jour j’ai pu méconnaître la noblesse de vos sentimens ; je vous ai poursuivi de mon ironie publique dans les cercles : votre mérite m’était importun. Vous paraissez surpris de me voir chez vous, monsieur de Saint-Georges ; votre étonnement cessera quand vous m’aurez entendu. Ma vie se rattache à votre histoire, monsieur.

— Que peut-il y avoir de commun entre nous deux, monsieur le contrôleur général ?

— Vous allez le savoir, continua le vieillard, c’est devant vous seul que la voix de ma conscience m’ordonne de m’humilier. Dieu est juste, monsieur, et ce que j’ai à vous dire fera plus d’une fois rougir mon front… Je suis arrivé à un âge où le ciel nous garde souvent ses plus terribles épreuves. Celle qui m’accable à cette heure sera peut-être agréée par lui comme une expiation de mes fautes.