Page:Roger De Beauvoir - Le Chevalier De Saint-georges Edition2V4 1840.djvu/48

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

que ce n’était point un seigneur, mais un financier, grand trésorier de l’ordre du Saint-Esprit.

Puis, comme il n’est guère possible d’échapper aux investigations du peuple une fois qu’il est en émeute, il ne s’écoula pas trois minutes que le contrôleur général des finances de sa majesté, messire Jean-Nicolas de Boullogne n’eût été reconnu et insulté par cette plèbe furieuse.

— C’est un conseiller du roi, un ami de la reine ! s’écriait un homme ressemblant assez de loin à M. de Sauvigny, l’un des affidés du duc d’Orléans.

— C’est un suppôt de la ferme, un falsificateur de denrées, hurlait un commis nouvellement chassé de l’octroi.

— Il a écrasé une femme du peuple ! Il faut qu’il descende et nous fasse amende honorable…

— Sinon nous allons dételer ses chevaux et le cadenasser avec sa duchesse à falbalas dans sa voiture !

— Il paraît que non contens d’affamer le peuple, ces traitans veulent l’écraser !

— Mort à l’assassin, au contrôleur général ! criaient des voix d’ivrognes sortant par légions des cabarets.

— Ne lâchez pas les chevaux surtout, et tenez bien le cocher du gabelou par sa catacoua !…

Les menées du parti d’Orléans avaient, comme on le voit, porté leurs fruits… Sur le passage de la cour, il n’y avait eu que quelques cris rares et clairsemés de vive le roi ! L’honorable vieillard que ces invectives poursuivaient ne pouvait même les entendre, car dès la première irruption du peuple autour