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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

égorgés. L’homme courait partout, comme s’il eût déjà connu la prison ; il bravait les tourbillons de fumée qui le suffoquaient. Après avoir escaladé la muraille du château avec sa ceinture, et le poignard à la main, il entra dans la chambre de ces hommes réveillés tous en sursaut. Escorté de sa troupe, il ne trouva guère qu’une faible résistance. Arrivé à la porte d’une petite chambre, le pied lui manqua, et il tomba tout d’un coup dans un puits construit en forme d’oubliette dont le plancher fléchit sous son poids.

Ajuto ! Ajuto ! cria-t-il d’une voix lamentable en se voyant accroché miraculeusement par son habit à un large crampon de fer qui le retint suspendu…

Une main inconnue lui jeta une ceinture, et le malheureux remonta à la margelle avec l’adresse d’un chacal.

Muerte ! cria-t-il en reconnaissant un uniforme d’officier français ; je suis perdu ! Mes armes ont roulé au fond de ce gouffre de pierre…

Et présageant sans doute que son ennemi allait le tuer dès qu’il reconnaîtrait son erreur, il l’étreignit lui-même dans ses bras robustes avec une force surhumaine. Mais celui qu’il attaquait eut le bonheur de se dégager, et tirant son épée, il lui en perça le cœur…

L’homme roula à terre avec le bruit d’un taureau. Il allait murmurer une imprécation contre l’officier quand il vit arriver un valet, une lanterne à la main et les cheveux en désordre, courir au prisonnier pâle d’inquiétude en s’écriant :