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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

Saint-Domingue ! où peut-être il y a encore ce qu’il n’y a déjà plus ici, de la paix et du bonheur !…

— Ainsi tu refuses de m’accompagner ; tu crains de succomber dans ce voyage ?

— Mes jours sont comptés. Je quitterai la vie sans regret, puisque j’ai serré mon frère entre mes bras !

— Ah ! jamais, jamais je ne me séparerai de toi ! s’écria Maurice avec un accent d’angoisse. Je ne te laisserai pas seul exposé ainsi à la maladie, à la misère !

— Il faut que tu partes, Maurice ; il faut que tu ailles régler à Saint-Domingue des affaires indispensables. Tu me trouveras guéri et fort à ton retour, reprit-il avec un sourire où perçait une cruelle amertume.

— Voici une copie du testament de notre père, reprit Maurice de Langey en baissant la voix ; tu verras où l’a amené son repentir, sa sollicitude pour toi. Il te donne en partage avec moi le domaine de la Rose.

— La Rose ! s’écria Saint-Georges en jetant sa main fiévreuse vers le papier que Maurice lui présentait, la Rose ! où nous avons été élevés. Quoi ! la Rose la Rose ! à moi !…

— À nous deux, murmura tout bas Maurice.

— Oh ! c’est impossible ! continua Saint-Georges en priant La Boëssière de lui lire le testament, car sa vue était trop faible et les sanglots suffoquaient alors son frère.

— La Rose, reprit le maître d’armes après avoir lu l’écrit. Le testateur exige seulement que Joseph Platon en devienne l’intendant immédiat.