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LE CHIFFRE DE LA REINE.

ce qu’il peut tramer de nouveau contre le roi ? Vous êtes de nos ennemis, monsieur, vous devez savoir où est le péril…

— Il y a péril, madame, répondit-il en regardant la reine avec une respectueuse assurance, du jour où un homme qui n’a pas le droit d’entrer ici à cette heure est mandé par vous, la nuit, dans votre palais ; il y a péril du jour où vous-même tremblez devant cet homme. On m’a calomnié, madame, en me disant l’ami du duc. Le duc d’Orléans me fait pitié !

Il y eut une pause glaciale de quelques secondes entre la reine et le chevalier. Après l’avoir envisagé avec attention, elle lui fit signe de s’asseoir. Madame de Lamballe, retirée dans un coin du salon, avait pris par contenance un canevas de broderie.

La reine se hâta de reprendre :

— Vous avez accompagné, je crois, le duc d’Orléans en Angleterre ?

Saint-Georges resta muet ; il se flattait que la reine ignorait encore ce voyage… Il était venu pour la sauver, et voici qu’elle l’accusait.

— Madame, répondit-il, car il se voyait bien forcé de répondre à cette souveraine interrogation, j’ai suivi le duc à Londres… Puisque le nom de cet homme est inséparable du mien dans votre pensée, il faut bien que je dénoue d’abord moi-même le nœud fatal qui nous lie. Je n’appartiens plus au duc d’Orléans, madame ; j’appartiens aux convictions de ma conscience. Un prince du sang m’avait tendu la main à mon entrée dans le monde : c’était alors un homme de plaisirs et d’étourderie ; j’étais loin de penser qu’il