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WAPPING.

Saint-Georges qu’appartenait de droit une telle révolution.

En écoutant cet homme, le chevalier se fût persuadé difficilement qu’il mentait. Doué lui-même longtemps d’un extérieur agréable, rompu de bonne heure aux belles manières de la cour, le duc formait un être d’autant plus étrange que les traces d’une éducation généreuse se confondaient par instans avec les vices qu’il avait acquis. Il était prodigue et mesquin, haut et familier, facile et dangereux ; passant ainsi par tous les contrastes pour arriver en définitive au mépris. Son intimité pesait d’autant plus au chevalier qu’elle prenait sa force dans je ne sais quelle bizarre conformité de goûts et de toilette. Le duc avait une ferveur de novice pour la moindre mode que donnait Saint-Georges : c’était son oracle, son Dieu ! Les rouages ténébreux de sa politique, il les lui cachait avec autant de soin qu’un horloger en met à cacher ceux d’une montre. Ce n’était avec lui qu’un camarade de gaîté, si toutefois on peut appeler gaîté la froide ironie d’un homme qui se joue des choses les plus saintes. Il affectait ainsi de traiter Saint-Georges avec une légèreté excessive : désespérant d’en faire un anarchiste, il voulait le compromettre à tout hasard.

L’arrivée du prince à Londres n’émut guère que les clubistes ; celle de Saint-Georges fit courir tout le beau monde… C’était ce que le duc d’Orléans avait prévu. À la faveur de cet engouement, il put bientôt reprendre avec le bas peuple et quelques gentilshommes du parti de l’opposition les négociations com-