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sion s’introduisait chaque jour dans l’ordre universel. L’âge d’or que nous entrevoyons à l’horizon de l’avenir, ils le plaçaient loin derrière eux dans le recul des temps.

Ainsi leur passion pour le bel ordre les trompait. L’ordre sans doute règne dans l’immense nature ; mais il est bien plus complexe que l’homme par les premiers efforts de sa raison ne pouvait se le représenter ; il est d’ailleurs éternellement changeant.

Pourtant jamais la statuaire ne fut plus radieuse que lorsqu’elle s’inspira de cet ordre étroit. C’est que cette calme beauté pouvait s’exprimer tout entière dans la sérénité des marbres diaphanes : c’est qu’il y avait accord parfait de la pensée et de la matière qu’elle animait. L’esprit moderne, au contraire, bouleverse et brise toutes les formes dans lesquelles il s’incarne.

Non, jamais nul artiste ne surpassera Phidias. Car le progrès existe dans le monde, mais non dans l’art. Le plus grand des sculpteurs qui parurent dans le temps où tout le rêve humain pouvait s’enclore dans le fronton d’un temple restera à jamais inégalé.