Page:Rodenbach - Vers d’amour, 1884.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.


III


Vous n’avez pas voulu. Peut-être est-ce sincère,
Votre vie est un parc dont un grillage noir
Empêche qu’on approche et qu’on y puisse voir
Des massifs de verdure et des blancheurs de serre.

Vous voulez dans ce parc de jeunesse marcher
Seule, prêtant l’oreille aux tendresses lointaines,
Comme au sanglot confus de distantes fontaines
Qui pleurent tristement aux fentes d’un rocher.

Mais en avez-vous clos vraiment toutes les portes,
Et dans le brouillard bleu des soirs extasiés
Aucun n’est-il venu défleurir les rosiers
Qu’a fait germer le temps sur vos tendresses mortes ?

Peut-être en aimez-vous un autre ? Ô goûts pervers !
Dans l’étang de son parc, au lieu d’un calme cygne
Promenant la fierté de sa blancheur insigne,
On y met des canards parmi les roseaux verts !




IV


Adieu ! je ne suis pas de ceux qu’on humilie !
Vous m’avez repoussé, vous m’avez dédaigné ;
J’ai senti que mon cœur orgueilleux a saigné
Et longuement je meurs de ma mélancolie.