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De n’avoir pas été suffisamment aimées,
Qui, dégageant le gris mourant de leurs fumées
Comme une plainte d’âme exténuée et vierge,
Agonisent dans le brouillard qui les submerge.
Ensommeillement doux de mes villes natales
Que, le soir, je retrouve en des marches mentales ;
Mais, le long des vieux quais, ô mon rêve, où tu erres,
Hélas ! Tu reconnais des maisons mortuaires
Que dénoncent, jusqu’à l’obit, parmi la brume,
Ce cérémonial d’une antique coutume :
Un nœud de crêpe noir qui flotte sur les portes ;
On dirait des oiseaux cloués, des ailes mortes…
Puis, sur les volets clos, une grande lanterne
Pend, de qui la lueur si grelottante et terne
Brûle, en forme de cœur, dans la prison du verre.
C’est comme de la vie encor qui persévère
Et l’on croirait que l’âme ancienne est là qui pleure
Et guette pour rentrer un peu dans sa demeure !