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LES LAMPES


Qu’est-ce encor que ces bruits, au loin, qui continuent ?
Le silence aux conseils de l’ombre cède enfin ;
C’est l’heure tiède où l’on devient un peu divin…
Des nénuphars sont nés parmi les glaces nues.




Un ecclésiastique amour de la douceur
Revêt comme de lin pascal et d’innocence ;
On se semble approcher de la fin d’une absence,
Ou veiller le sommeil d’une petite sœur.




La lampe perce un peu les mystères ; on voit
Des signes éclater dans la demeure obscure.
Est-ce qu’un oiseau blanc s’est posé sur le toit ?
On dirait tout à coup qu’on habite une cure.




Douceur ! La lampe met dans l’âme un temps de mai
Et des clartés d’argent fluide où l’âme trempe ;
Le clair de lune fait les grands lys se pâmer ;
L’âme, ce lys aussi, se pâme au clair de lampe.