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Dans cette solitude où son élan se brise.
Ah ! que n’a-t-il plutôt humblement accepté
Le sort calme d’avoir pour sœurs les roses thé,
Et de ne se crisper qu’à peine sous la brise,
Et d’être un étang plane au niveau du jardin ?
Orgueil ! Il a voulu toucher le ciel lointain,
S’élever au-dessus des roses, ô jet d’eau
Qui se termine en floraison de chapiteau,
Comme pour résumer à soi seul tout un temple.

Ah ! l’effort douloureux, toujours inachevé !
Il est debout, encor qu’il chancelle et qu’il tremble ;
Il est celui qui tombe après s’être élevé ;
Il rêve en son orgueil l’impossible escalade
De l’azur, où planter son frêle lis malade ;
Il est le nostalgique, il est l’incontenté ;
Il est l’âme trop fière et que le ciel aimante.
— Ah ! que n’a-t-il vécu du sort des roses thé
Parmi l’herbe où leur vie est heureuse et dormante ! ―
Il est le doux martyr d’un idéal trop beau ;
Il espérait monter jusqu’au ciel, le jet d’eau !
Mais son vœu s’éparpille ! Et sa robe retombe
En plis agenouillés comme sur une tombe.