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Son triomphe fut court : l’heure de Dieu sonna :
Alors, rassasié, chacun l’abandonna
Et la misère vint traîner son spectre avide
Au foyer où pleurait Rosine, le cœur vide !…
Bientôt son front pâlit sous les baisers jaloux
Et les chants firent place aux accès de la toux ;
Sa marche chaque jour devint plus chancelante,
Son visage plus creux et sa voix plus tremblante.
L’automne allait finir ; des arbres dégarnis
Étaient déjà tombés les feuilles et les nids.
Rosine, je le crus, resterait à l’étage,
Mais un jour en passant je vis, contre l’usage,
Tous ses volets fermés, et puis, deux jours plus tard,
Par un ciel tout couvert de pluie et de brouillard,
On l’aida pour venir jusqu’au rez-de-chaussée.
Elle était morte hélas ! Coupable et délaissée !…
En terre on la porta, mais pas un seul ami
Ne suivit son cercueil, et moi j’en ai gémi
En disant : « Temps heureux où là dans la mansarde
Elle était près du ciel et de Dieu qui nous garde !… »